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Colloque sur le travail avec le Club Landoy à l'Assemblée Nationale

J’ai organisé avec le Club Landoy le colloque «Préparer les transitions : quel travail voulons-nous aujourd’hui et demain ?», sous le haut patronage de Yael Braun Pivet.

Merci à nos 25 intervenants - dirigeants d’entreprises, syndicaux et associatifs, députés, chercheurs, entrepreneurs et journalistes – pour leurs échanges dans la nuance et le respect. Collectivement nous avons montré que l’Assemblée Nationale peut être un lieu d’écoute et de réflexion transpartisanes pour le bien commun.

Voici quelques éléments que j’en retiens et que je souhaitais partager :

🔷 Le travail est une réalité quotidienne pour tous - indépendants, salariés, fonctionnaires. C’est un lieu de construction sociale, de l’estime de soi et de l’autonomie financière.

🔷 Le maintien des seniors dans le monde du travail est une ambition qui doit se déployer sans tarder et je veux saluer le travail novateur du Cub Landoy sur la question. C’est un enjeu économique autant que de cohésion sociale.

🔷 Nous devons penser la santé comme un tout – physique et mentale, personnelle et au travail. Un travailleur arrive au travail avec ses joies, ses peines et sa santé. Il faut mieux prendre en compte les nouvelles pénibilités, en particulier dans les services, car elles sont toujours mal appréhendées.

🔷 Les aidants familiaux ne doivent pas se substituer aux carences du secteur médico-social. Guidés par l’affection pour la personne qu’ils aident, ils ne doivent pas être enfermés dans ce rôle. L’entreprise est un lieu d’entraide et une forme de retour à la normalité quand les choses à la maison sont difficiles.

🔷 Il nous faut un plan national pour les professionnels – ce sont presque toujours des femmes – du lien et du « care ». Elles sont essentielles, nous leurs confions nos plus proches et pourtant elles cumulent les difficultés : bas salaires, pénibilités, faible protection par la prévoyance, faibles perspectives de reconversion.

🔷 La dignité au travail commence par une rémunération à la hauteur. Partage de la valeur et renégociation minimas inférieurs au SMIC : il faut que le travail paye, c’est la clef de son attractivité.

🔷 Poursuivons la réindustrialisation de notre pays : ce sont les emplois industriels qui offrent les meilleurs salaires et perspectives.

🔷 Dans les entreprises les pratiques managériales doivent être renouvelées. Comme en politique, la décision la meilleure est souvent prise là où a lieu l’action. L’autonomie est un facteur d’engagement, de cohésion des équipes et de confiance.

🔷 Un agenda national du travail est une alliance de la loi, du dialogue social et des pratiques managériales. Le politique fixe un cadre et un cap ; aux entreprises et syndicats de décider des mises en œuvre ; aux managers d’engager leurs équipes par la confiance et le sens.

🔷 Un travail qui paye, a un sens, est soutenable, donne des perspectives, crée du lien, c’est donner à tous nos concitoyens la possibilité de choisir sa vie et trouver toute sa place. Un beau projet politique en somme !


Voici également l'intégralité de mon discours de clôture :


La teneur des débats n’a découragé personne ! Sybille Le Maire, cela a été un plaisir d’organiser cette journée avec vous, sous le haut patronage de Yaël Braun-Pivet, la Présidente de l’Assemblée nationale. J’espère d’ailleurs que cette journée vous a tous fait changer l’idée que vous vous faites peut-être de l’Assemblée nationale. C’est aussi un lieu de réflexion, un lieu de débat, un lieu d’écoute, un lieu de travail transpartisan.

J’aime bien utiliser l’expression en vogue aux États-Unis, après de longues journées de réflexion, qui est « Qu’est-ce qu’on fait lundi matin ? » Nous tous, députés, managers, responsables syndicaux, que fait-on après avoir emmagasiné toutes ces réflexions ? On a bien vu qu’il y a une voie médiane entre le discours sur le droit à la paresse et le discours sur l’aliénation, que le travail est une réalité quotidienne pour 30 millions de nos concitoyens, qu’ils soient salariés, indépendants ou fonctionnaires. On a bien vu, à travers les interventions d’aujourd’hui, combien le travail est un lieu de construction sociale, de l’estime de soi et de l’autonomie financière. Il est aussi à la base du contrat républicain qui veut que lorsqu’on travaille en respectant la règle, on doit réussir à se construire une meilleure vie pour soi-même et pour ses enfants. C’est précisément quand ce fil n’est plus au rendez-vous qu’on peut avoir à faire face à des vents populistes comme on les connaît aujourd’hui.

Cette ambition, en effet, se heure à la réalité. Il y a ceux pour qui tout va bien et d’autres, moins nombreux certes mais pour lesquels les choses sont plus compliquées. On nous avait collectivement promis le « monde d’après du Covid ». On voit, à bien des égards, que l’on est revenu au monde d’avant, à quelques progrès près. On a parlé des salaires, de certaines conventions collectives qui bloquent pendant des années et des années le salaire d’entrée qui reste le SMIC. Il y a un élan et un effort national à faire notamment sur les métiers du lien. Mais il y a aussi tous ceux qui ne sont ni assez riches pour vivre bien, ni assez pauvres pour être aidés, et pour qui les primes diverses ne servent pas à se projeter dans la vie mais simplement à couvrir les petits à-côtés, les petits plaisirs. Les vacances, les petites choses pour les enfants et qui font que la vie a aussi du piment. Il y a ceux dont la santé est abimée, on en a beaucoup parlé aujourd’hui à travers les questions de santé mentale et de pénibilité. Cette pénibilité, dans les métiers du soin, de caristes, de caissières, etc., est mal appréhendée par les politiques publiques. On a beaucoup parlé des seniors. Je veux saluer le travail pionnier du Club Landoy sur la question. On sent que les entreprises vont commencer à se sentir obligées de rendre des comptes sur ces sujets.

C’est intéressant de voir le lien entre la macro-économie et la vie des gens. J’ai été très intéressée ce matin par la remarque de Dimitris Mavridis, de l’OCDE, disant qu’en augmentant le taux d’activité de nos seniors au niveau des mieux-disants européens, on gagnerait 10 points de PIB. Un point de PIB, c’est 25 milliards d’euros… On a aussi parlé des 1,5 millions d’emplois créés ces cinq dernières années mais qui sont des emplois peu productifs. On a perdu 2 millions d’emplois dans l’industrie au cours des 30 dernières années. Or ce sont souvent ces emplois industriels qui fournissent les meilleurs salaires et les meilleures perspectives. Dans la vie des gens, tout cela se traduit par un désengagement au travail et, pour les entreprises, par une tension sur le recrutement et la fidélisation. On a parlé de dignité au travail, et notamment du travail qui paie. Il y a là un vrai sujet. Nous avons voté aujourd’hui l’accord interprofessionnel sur le partage de la valeur ajoutée. Très concrètement, cela va favoriser les dispositifs de participation et d’intéressement dans les entreprises de 10 à 50 salariés. Mais là encore, on parle de prime et d’intéressement. Or le vrai sujet, c’est celui du salaire, de ces gens qui sont scotchés au SMIC. Je crois beaucoup au dialogue social mais l’État doit aussi pouvoir peser sur les branches conventionnelles qui ont des minima conventionnels inférieurs au SMIC. Il y en a encore une bonne vingtaine qui n’ont pas renégocié les rémunérations depuis un an. On a beaucoup parlé santé dans toutes ses dimensions (mentales, physiques, environnementales…), « One Health » d’après le terme de l’Organisation Mondiale de la Santé. Un salarié qui intègre une entreprise, une usine, il vient avec ses joies, ses peines, sa santé. L’interconnexion dans et hors du travail est très forte. L’Oréal me disait avoir continué à investir sur la médecine du travail, les assistantes sociales, pour privilégier aussi ce capteur de la réalité sociale. Mais ce n’est évidemment pas dans les capacités de toutes les entreprises. J’ai entendu aussi aujourd’hui combien de plus en plus d’entreprises commencent à « prendre soin » de leurs salariés parce que l’État providence tel qu’on l’a connu est moins en mesure de le faire. On a parlé d’engagement au travail, et l’on voit bien comment donner plus d’autonomie, plus de pouvoir de décision à celui ou celle qui est en mesure de prendre la décision est un facteur d’engagement et de confiance.

J’avais eu la chance d’échanger avec le responsable des relations sociales de Michelin, qui avait vu le taux d’engagement des ouvriers dégringoler. Ils sont alors revenus en petites équipes à qui ils ont demandé de s’interroger sur la reprise de contrôle et d’autonomie dans l’activité. Quelles seraient leurs propositions ? En quelques années, le taux d’engagement des ouvriers a non seulement fortement augmenté mais il a même été supérieur à celui des cadres. Autonomie, pouvoir d’écoute, capacité d’agir, ça vaut pour l’entreprise mais aussi pour la politique !

On a parlé des aidants. Effectivement, ils ne doivent pas se substituer aux carences du médico-social. Aider, cela doit être un choix, d’abord guidé par l’amour, par l’affection qu’on porte à la personne en difficulté. Les aidants n’ont pas envie d’être enfermés dans ce rôle. L’entreprise peut être, on l’a dit, un lieu d’aide et d’entraide entre collègues. C’est là que j’aimerais m’arrêter sur les métiers du Care. La valeur que l’on accorde à ces personnes dit beaucoup de notre société. Ils sont en charge de nos plus proches, de nos plus chers, de nos bébés, de nos jeunes enfants, de nos parents. Et pourtant, ce sont elles – car ce sont en majorité des femmes – qui cumulent toutes les difficultés. Salaire bas, autour de 900 euros par mois, absence de perspectives -il faut savoir que lorsque l’on passe d’aide-ménagère à auxiliaire de vie, après six mois d’études supplémentaires, le gain mensuel brut est de 7,55 €…-, absence de protection collective. Notre système d’état-providence a été construit autour des entreprises. Il y a maintenant à construire progressivement cette protection autour des parcours individuels. Sur la question de la prévoyance, situation est encore insatisfaisante dans la fonction publique pour ceux qui ne sont pas titulaires, mais n’oublions pas les 2,5 millions de salariés qui n’ont pas de couverture prévoyance. En cas d’invalidité, d’arrêt de travail long, de décès, ils sont très faiblement protégés. Il y a de l’espoir, quand on voit les résultats obtenus en matière de prévoyance par Séverine et ses collègues (dont parlait Arthur Delaporte) après qu’elles aient fait grève. Mais on voit l’énergie que cela nécessite.

Je crois qu’une politique autour du travail, c’est une alliance entre les politiques, les partenaires sociaux et des pratiques managériales. La loi ne peut pas tout, et bien heureusement. C’est aussi à l’entreprise, aux managers, aux partenaires sociaux, de s’emparer des outils. Tout doit commencer par l’écoute. C’est vraiment aux entreprises et aux syndicats de trouver des solutions. C’est tout l’objet de cet agenda social qui a été fixé entre les partenaires sociaux sous l’égide de la première ministre. Au fond, et c’est pour cela que se battent les députés de tout l’arc républicain, ce qui est en jeu à travers le travail, c’est de pouvoir choisir sa vie. C’est que chacun trouve sa place parce que l’on est fondamentalement convaincus qu’il y a une place pour chacun et que le travail peut formidablement aider à trouver sa place. Travail qui paie. Travail qui a un sens. Santé au travail. Travail qui donne des perspectives. Soutien à ceux qui nous aident à travailler… On va continuer à prendre ces sujets à bras-le-corps. Merci pour cette journée !

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